Sassenage dans l'Histoire

Sassenage pendant la Seconde Guerre mondiale

Une ville décorée pour son courage

Sassenage, commune située aux portes du massif du Vercors, a été honorée de la Croix de guerre avec étoile d'argent pour son courage et son engagement dans la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale. Cette distinction témoigne du rôle important que la ville et ses habitants ont joué dans la lutte contre l'occupant nazi.

La commune de Sassenage a été un lieu stratégique pendant cette période sombre de l'histoire française. À la croisée des chemins entre Grenoble et le Vercors, elle a servi de point de passage pour de nombreux résistants, de lieu de rencontre pour organiser la lutte armée, et de base arrière pour le ravitaillement des maquis.

Les grandes figures de la Résistance sassenageoise

Louis Reverdy, le maire héroïque

Louis Reverdy, maire de Sassenage de 1936 à 1944, incarne l'engagement citoyen poussé jusqu'au sacrifice ultime. Ancien combattant de la Première Guerre mondiale, il met son expérience et sa position au service de la Résistance dès les premières heures de l'Occupation.

Son café, situé sur la place du village, devient un lieu de rendez-vous clandestin pour les résistants souhaitant rejoindre le maquis du Vercors. Loin de se contenter d'un soutien passif, Louis Reverdy s'implique activement dans des actions clandestines : cache de résistants, ravitaillement des maquis, fabrication de faux papiers, et même protection d'une famille juive qu'il héberge en face de son établissement.

Arrêté par la Gestapo le 16 juin 1944, sur dénonciation et dans le contexte des combats de Saint-Nizier des 13 et 15 juin, Louis Reverdy subit huit jours de torture sans jamais révéler les secrets de la Résistance. Il meurt le 2 juillet 1944 dans le "train de la mort" qui le conduisait au camp de concentration de Dachau.

Jean Prévost, l'intellectuel combattant

Jean Prévost, écrivain et journaliste de renom, représente l'alliance de la pensée et de l'action dans la Résistance. Avant la guerre, cet intellectuel normalien et polyglotte était une "plume" recherchée dans les milieux littéraires parisiens.

Son engagement dans la Résistance prend forme lorsqu'il séjourne chez son ami Pierre Dalloz aux Côtes de Sassenage. Dès 1943, il s'implique activement dans le projet "Montagnards", sillonnant le Vercors à vélo pour repérer les positions stratégiques. Après avoir rejoint le Comité national des écrivains, il assure la liaison entre militaires et civils, tout en effectuant des missions à Paris et Lyon pour financer le maquis.

En avril 1944, il devient le capitaine Goderville, prenant la tête d'une compagnie civile qui combat les 13 et 15 juin à Saint-Nizier.

Jean Prévost trouve la mort le 1er août 1944 dans une embuscade au Pont Charvet, aux côtés de quatre autres résistants : André Jullien du Breuil, Charles Loysel, Jean Veyrat et Alfred Leizer.

Pierre Dalloz, l'architecte du Plan Montagnards

Pierre Dalloz, architecte urbaniste, alpiniste, photographe et écrivain, est l'instigateur du Plan Montagnards, qui visait à faire du Vercors un "château fort" de la Résistance. Dès 1941, dans sa maison familiale des Côtes de Sassenage, il imagine ce plan ambitieux et en parle à son ami Jean Prévost ainsi qu'au Général Charles Delestraint, premier chef de l'Armée secrète.

En février 1943, le projet est soumis aux Alliés à Londres par le Général Delestraint. Suite à cette approbation, une réunion stratégique se tient aux Côtes de Sassenage entre Delestraint, Dalloz et le résistant Yves Farge pour peaufiner le plan.

Malheureusement, l'arrestation de Jean Moulin et du Général Delestraint bouleverse le projet initial. Pierre Dalloz doit fuir en exil pendant plus d'un an, voyageant entre Londres et Alger pour tenter de faire appliquer le Plan Montagnards. Malgré ses efforts, les renforts promis n'arriveront jamais, contribuant à l'échec relatif de l'opération du Vercors.

Le Pont Charvet et son mémorial : lieu de mémoire

Le Pont Charvet, situé dans les gorges d'Engins entre Sassenage et le Vercors, est devenu un symbole de la Résistance locale. C'est là que Jean Prévost et quatre de ses compagnons ont trouvé la mort le 1er août 1944, lors d'une embuscade tendue par les forces allemandes.

Créé à l’initiative de Pierre Dalloz en 1948, le mémorial érigé à cet endroit honore la mémoire de ces résistants et de tous ceux qui ont combattu pour la liberté. On y trouve inscrits les noms de Jean Prévost, André Jullien du Breuil, Charles Loysel, Jean Veyrat, Alfred Leizer, mais aussi ceux de Robert Repellin, Marcel Pourchier, Paul Arnaud, François Blumet, Georges Jasserand, Henri Perret et Charles Richard.

Ce lieu de mémoire rappelle également le sacrifice de bien d'autres résistants sassenageois, comme Marguerite Hospital, abattue au lieu-dit la Grande Cascade, le jeune Camille Armand, décédé en captivité en 1941, ou encore René Augustin, assassiné sur la route de Valence.

Aujourd’hui, Sassenage continue de porter la mémoire de ces femmes et hommes qui ont résisté à l'oppression nazie. À travers des expositions, des commémorations et la transmission aux jeunes générations.